Quand on lance une entreprise, le bouche-à-oreille, c’est magique! Les premiers clients arrivent «naturellement», un ami te recommande, un ancien client en parle à un autre… et hop, ton horaire se remplit! Pas besoin de publicité, pas besoin d’équipe marketing, pas besoin de plan stratégique complexe.
Au début, ça suffit! Tant que tu es seul ou avec un ou deux employés, ça roule!
Mais quand tu commences à avoir plusieurs employés, la réalité change. Les salaires tombent toutes les deux semaines, que les clients soient au rendez-vous ou non. Trouver et garder les bonnes ressources coûte cher. Les périodes creuses deviennent beaucoup plus douloureuses. Et pendant ce temps, le loyer continue de tomber.
Sans parler de la difficulté à trouver de bons employés. Ils n’ont pas toujours la formation nécessaire et rares sont ceux qui prennent des initiatives. Alors, tu espères qu’ils resteront le plus longtemps possible pour amortir ton investissement en temps et en argent.
C’est là que tu entres dans cette fameuse zone qu’on appelle la Vallée de la mort (VALLEY OF DEATH). Non, je ne parle pas de celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom dans Harry Potter, mais bien de ce passage délicat dans la vie d’une entreprise où la croissance est freinée par un manque de prévisibilité et de structure. C’est le genre de concept qu’on retrouve dans les livres d’affaires, mais ici, je veux te partager ma version. Celle que j’ai vécue dans ma propre entreprise… et que j’ai vue freiner d’autres entrepreneurs que j’ai accompagnés. Dans cette version, même le bouche-à-oreille prend un sens différent!
La Vallée de la mort: ce que vivent les entreprises en croissance
La Vallée de la mort en affaires, ce n’est pas juste un terme dramatique inventé par des coachs pour te faire peur. C’est une réalité que vivent la majorité des entreprises en croissance.
En moyenne, tous types d’entreprises confondus, seulement 35,3% des nouvelles entreprises sont encore en activité après cinq ans.
Cependant, si une entreprise comptait 5 employés ou plus dès l’année de création, le taux de survie grimpe à 54,4%.
On l’appelle ainsi parce que beaucoup d’entreprises s’y perdent. Elles avancent, mais chaque pas demande un effort énorme et le moindre imprévu peut les faire basculer. Les charges fixes augmentent, les dépenses pour maintenir les opérations deviennent plus lourdes, les salaires tombent à chaque paie et le loyer ne cesse pas, peu importe le niveau des ventes. On se retrouve à courir pour remplir le carnet de commandes.
La Vallée de la mort: le passage obligé entre chaque palier de croissance
Dans son livre Scaling Up, Verne Harnish explique que la vie d’une entreprise, c’est un peu comme une série de montagnes à gravir. Et franchement, très peu arrivent en haut de chaque sommet. Sur environ 28 millions d’entreprises aux États-Unis, seulement 4% réussissent à atteindre le fameux million de chiffres d’affaires annuel. Ça veut dire que 96% n’y arrivent jamais… ou restent coincées au même niveau pendant des années.
Plus on grimpe, plus l’air se fait rare. À peine 17 000 entreprises dépassent les 50 millions par an, soit seulement 0,06% du total. Autant dire que les probabilités ne sont pas franchement en ta faveur.
Harnish décrit ce parcours comme une suite d’ascensions séparées par des zones dangereuses. Entre chaque sommet, il y a un passage critique: la Vallée de la mort. Pour passer d’un palier de chiffre d’affaires au suivant, tu dois la traverser. Et si tu t’y aventures sans préparation… disons que les chances d’en ressortir sont minces.

Quand la croissance stagne
C’est un peu comme traverser un désert avec juste assez d’eau pour avancer, mais pas assez pour être certain d’atteindre l’autre côté. On voit la prochaine étape au loin, on sait que la stabilité existe, mais le chemin pour y arriver est long et exigeant.
Ce qui rend cette phase encore plus complexe, c’est qu’elle peut durer longtemps. On a l’impression d’avoir trouvé un rythme, puis un creux survient et rappelle brutalement à quel point la marge de manœuvre est mince. Chaque investissement devient un pari. Chaque décision a un poids plus grand, car l’équilibre est fragile.
Sortir de la Vallée de la mort demande plus qu’un simple coup de chance. C’est un passage qui oblige à mieux structurer son entreprise, à solidifier ses fondations et à gérer avec précision ses ressources. C’est aussi un test mental : rester motivé et confiant, même quand la progression semble lente, est souvent ce qui sépare ceux qui traversent de ceux qui s’y arrêtent.

Qu’est-ce qui freine la croissance des PME
Les causes qui mènent à la Vallée de la mort sont rarement liées à un seul facteur. C’est plutôt un mélange de pressions qui s’accumulent avec le temps: des charges fixes qui augmentent plus vite que les revenus, un recrutement coûteux qui ne donne pas toujours les résultats attendus, une difficulté à déléguer et un manque de processus clairs qui complique la formation des nouveaux employés et accroît la dépendance à quelques personnes clés
L’absence de prévisibilité dans les ventes, qui force à jongler entre des périodes de surcharge et des périodes de creux. Et puis il y a le temps et l’énergie consacrés à gérer les urgences plutôt qu’à structurer l’entreprise. Petit à petit, tout cela gruge la marge de manœuvre, étire la patience et place l’entrepreneur dans cette zone grise où il travaille fort… sans jamais sentir qu’il prend vraiment de l’avance.
Le piège du bouche-à-oreille
Quand tu t’appuies uniquement sur les références, tu ne choisis pas tes clients, ce sont eux qui te choisissent. Tu te retrouves à dire oui à des mandats qui ne correspondent pas toujours à ton cœur d’expertise, juste pour remplir le calendrier. Chaque client étant différent, tu ajustes ton offre à chaque fois.
Sur papier, ça peut sembler positif, tu es «personnalisé», mais en réalité, cette personnalisation permanente devient ton piège. Tes employés n’ont pas toujours la formation ou l’expérience pour s’adapter à toutes ces variations. Ils doivent constamment apprendre sur le tas et rares sont ceux qui prennent des initiatives quand le terrain change à chaque mandat. Au final, tu deviens toi-même le point de passage obligé de tous les projets. Et si tu as de la misère à déléguer, c’est souvent une conséquence directe de cette adaptation chronique.
Si tu veux savoir si tu es prisonnier de la vallée de la mort, pose-toi ces questions:
- Est-ce que tes ventes sont irrégulières?
- Est-ce que tu peines à définir ton client idéal parce que tu prends « ce qui passe »?
- Est-ce que chaque projet est tellement unique qu’il est difficile de former quelqu’un pour le reproduire?
Si tu as répondu «oui» à au moins deux de ces questions, tu es probablement dans une zone de risque.
Pourquoi c’est difficile de déléguer?
Le problème c’est que les employés aiment se sentir utiles, mais ils aiment aussi savoir où ils vont. Quand chaque mandat est une nouvelle aventure, tu ne peux pas mettre en place de processus clairs et ton équipe n’a pas de repères pour travailler efficacement. C’est comme demander à un chef d’orchestre de diriger une symphonie différente à chaque répétition, sans jamais avoir le temps d’apprendre la partition.
Pendant que tu ajustes, les charges fixes ne s’arrêtent pas. Les salaires tombent toutes les deux semaines, même quand les ventes ralentissent. Les périodes creuses se font sentir, et dans le monde des affaires, chaque jour d’attente coûte cher.
Prenons l’exemple d’une entreprise spécialisée en tenue de livres. Elle accepte tout ce qui passe: formation, implantation de systèmes, comptabilité d’entreprise, impôts particuliers. Résultat, il y a des mois très chargés et d’autres, où presque rien ne rentre. Les bons mois servent à couvrir les mauvais et au final, il n’y a pas de vraie profitabilité. Parfois, même des pertes.
Puis un jour, tu réalises que continuer ainsi, c’est t’épuiser pour maintenir un équilibre qui ne tient pas à grand-chose. Tu engages un coach d’affaires qui te promet la lune… mais tu restes au même point mort.
Sortir de la Vallée de la mort: Stratégie de croissance
Si tu décides de changer. Tu dois identifier ta clientèle la plus profitable, comprendre précisément ses besoins et construire une offre irrésistible. C’est le moment où tu passes du rôle de joueur réactif à celui d’entrepreneur en croissance.
Les entreprises qui franchissent le cap du million ou qui parviennent à doubler leur chiffre d’affaires ont un point commun: elles contrôlent leur acquisition. Elles ne laissent pas le marché décider qui viendra frapper à leur porte.
Dans la Ligue de garage, tu vis au rythme des opportunités, tu adaptes tout à chaque mandat et vendre reste un processus long et imprévisible. Dans la Ligue majeure, tu choisis tes clients, tu standardises ton offre et tu peux répéter les mêmes victoires encore et encore.
Comment éviter le piège du bouche-à-oreille
Le bouche-à-oreille, c’est comme un fameux potluck où tout le monde apporte “quelque chose”… mais tu ne sais jamais si tu vas te régaler ou regretter d’être venu. Parfois, c’est un plat incroyable. Parfois… c’est franchement décevant, comme une salade de patates pas cuite accompagnée d’un jello douteux. Sérieusement… qui mange du jello à part quand il est à l’hôpital?
En t’appuyant uniquement sur les références:
- Tu ne choisis pas qui devient ton client.
- Tu subis les périodes creuses sans pouvoir les anticiper.
- Tu acceptes parfois des mandats qui ne correspondent pas à ton cœur d’expertise, juste pour faire rentrer du cash.
Pourquoi le bouche-à-oreille reste précieux
Ne me fais pas dire ce que je n’ai pas dit! Le bouche-à-oreille est un signe fort que tu fais les choses comme il faut. Il montre que tes clients sont satisfaits, que ta réputation est solide et que ton service vaut la peine d’être recommandé.
Mais ce n’est pas une stratégie de croissance. C’est un canal naturel qui doit être complémentaire à un moteur d’acquisition proactif.
Question fréquente en marketing: «Mais si mon bouche-à-oreille marche, pourquoi investir ailleurs?»
Parce qu’un client satisfait ne parle pas toujours de toi au moment où tu en as besoin. Et même quand il le fait, ce n’est pas forcément à la bonne personne.
Et puis, soyons honnêtes: c’est rare que tu puisses te lever le matin en te disant «Tiens, aujourd’hui j’aimerais plus de bouche-à-oreille». Tu n’as tout simplement aucun contrôle là-dessus.
Et toi, es-tu prêt à changer de ligue?
Le bouche-à-oreille est un tremplin formidable, mais quand ton entreprise atteint une certaine taille, il devient dangereux de compter uniquement dessus. Celui qui prend le contrôle de son acquisition prend aussi le contrôle de son avenir.
Alors, veux-tu continuer à faire du surplace ou veux-tu faire propulser ta croissance au prochain niveau?